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5 septembre 2007 3 05 /09 /septembre /2007 19:32

Alors qu’une nouvelle polémique est lancée sur l’authenticité du masque mortuaire de Napoléon, le marché des reliques de l’empereur connaît une vigueur inédite. Mèches de cheveux, lettres ou bicornes s’arrachent, certains objets atteignant des sommes colossales. Près de deux siècles après la disparition de l’empereur, la légende napoléonienne est encore bien vivante. 

« Le coup du masque, ça ressort tous les trois étés ! » Aux Invalides, où repose
Napoléon et son fameux masque mortuaire, on s’agace de la dernière – et énième –
polémique en date. Bruno Roy-Henri, historien autoproclamé, affirme que le
masque des Invalides est un faux. Une théorie qui prend la poussière, mais lui
affirme avoir trouvé la preuve ultime que le véritable masque serait en fait
détenu par les Anglais. Sur un tableau de 1815 représentant Napoléon, Bruno
Roy-Henri a repéré une petite cicatrice absente du masque officiel, mais
repérable sur le masque anglais.

Une théorie fumeuse pour Emilie Perrier-Robbe, conservatrice aux Invalides, qui
déclenche une avalanche de contre-arguments. « Ce tableau, que Bruno Roy-Henri
n’a vu qu’en photo, est la seule image où l’on peut voir une cicatrice
éventuelle. Mais elle ressemble surtout à une fossette. Il faut aussi savoir que
le peintre, Charles Locke Eastlake, était à plus d’une quinzaine de mètres de
Napoléon quand il l’a peint. » De plus, il serait impossible qu’un masque en
plâtre puisse rendre compte d’une si petite cicatrice. « Pour que ça se voie, il
faudrait s’appeler Scarface ! ». Ajoutez à cela que le masque anglais aurait été
vendu en 1939 par Louis Charles de Bourbon, « un escroc notoire ». Aucune
hésitation pour les Invalides : la méthodologie de Bruno Roy-Henri est tellement
douteuse qu’il est hors de question de remettre en cause l’authenticité du
masque, « dont la traçabilité est tout à fait connue ».

« Il y a une volonté de l’Etat de ne pas traiter cette histoire, dénonce Bruno
Roy-Henri. L’Etat ne veut pas mettre en question l’Histoire officielle. » Mais
pourquoi ? « Il y a sans doute une raison d’Etat qui nous échappe. » Et Emilie
Perrier-Robbe de rétorquer avec humour : « C’est le Roy-Henri code ! »

Légendes et polémiques en tout genre se succèdent depuis la mort de Napoléon, en
1821, et les reliques de l’empereur, censées percer ses mystères, ont toujours
attiré les convoitises. Trois mythes récurrents occupent le podium : l’affaire
du masque, le doute sur l’identité du corps reposant aux Invalides et, bien sûr,
la célèbre théorie de l’empoisonnement. « On a besoin de légendes » explique
Emilie Perrier-Robbe des Invalides. « Si elles se cristallisent tant autour de
Napoléon, c’est parce qu’il représente l’homme de pouvoir, le self-made-man, les
rêves de grandes épopées et de gloire. Alors qu’un tel homme meure finalement
d’un cancer à l’estomac, ce n’est pas très glamour. La thèse de l’empoisonnement
est un bien meilleur script. »

Le charisme de Napoléon a tant marqué l’Histoire qu’aujourd’hui, la moindre de
ses reliques s’arrache à prix d’or. Le marché se porte bien, et profite depuis
quelques années d’un effet de mode engendré par plusieurs facteurs. D’abord, un
bicentenaire qui a commencé en 1996 (les premières grandes victoires militaires)
et qui devrait prendre fin vers 2015 (la fin de l’Empire). En parallèle, de
nombreux films et livres sont sortis, tout comme une nouvelle tendance
vestimentaire très inspirée de l’époque napoléonienne.

Concernant plus directement le petit monde de la collection, « le marché de
l’art s’est mondialisé » explique Jacques Jourquin, historien. « Et Napoléon est
le seul personnage historique français qui soit connu à l’international. » D’où
un nouvel intérêt des acheteurs étrangers pour les reliques de l’empereur. « Des
personnes richissimes, souvent américaines ou russes, sont apparues sur le
marché. Elles ont faussé les cotes, qui ont atteint un niveau jamais égalé. » 45
000 euros pour des bas portés par l’empereur, 97 000 euros pour un bicorne, 400
000 euros pour une lettre d’amour à Joséphine… Le paroxysme est atteint le 4
juillet dernier, avec l’épée de la bataille de Marengo, attribuée pour… 4.7
millions d’euros !

Néanmoins, toutes les reliques ne se situent pas dans ce genre de prix. Il en
est de plus accessibles, et surtout, elles sont bien plus nombreuses. Les
lettres signées de la main de l’empereur – il en reste plus de 40 000 – se
négocient à partir de 400 euros. Comptez 500 euros minimum pour un livre de la
bibliothèque de Napoléon, 600 pour une mèche de cheveux, 400 pour un bout de son
cercueil. « On peut même se procurer des feuilles du saule tombées sur sa tombe
de Sainte-Hélène, souvent vendues avec un peu de terre » assure Axel Louot,
expert en souvenirs historiques. Ou encore des morceaux de papier peint issus de
sa maison natale… « Mais il y a beaucoup de soi-disant reliques dont on ne
connaît pas avec certitude la provenance », prévient Axel Louot. Et plus la
traçabilité est bonne, plus les prix augmentent.

Malgré tout, quelques collectionneurs non-richissimes subsistent, comme
Pierre-Jean Chalençon, qui a commencé il y a plus de vingt ans à collecter des
reliques napoléoniennes. Mèches, lettres, mouchoirs, caleçons, crayons, savons,
pâte à dentifrice… Un partie du quotidien de l’empereur est réunie chez lui.
Parfois, pour obtenir une pièce, le collectionneur fait des sacrifices. « A 23
ans, j’ai acheté le premier testament de Napoléon, ce qui m’a coûté 60 000
francs, l’équivalent d’une petite voiture. J’ai fait un crédit. Et je n’ai
jamais passé mon permis. » Sa relique favorite reste un livre, que Napoléon
reçut à Sainte-Hélène quelques semaines avant sa mort. « Ce sont les mémoires de
Joséphine. C’est émouvant, car c’est le seul livre qu’il ait jamais lu sur elle.
»
En possédant ces objets, il a le sentiment d’avoir prise sur l’Histoire, de
détenir « un maillon de la chaîne ». Ce qu’il aime particulièrement, c’est de
pouvoir toucher ces reliques. « Chez moi, les objets vivent. Je lis les livres,
je me sers de la vaisselle. » Et aussi du dentifrice ? « Quand même pas, je
risquerais de finir à l’hôpital ! »
Napoléon, il l’a rencontré alors qu’il n’avait que huit ans, dans une bande
dessinée offerte par ses parents. « Je croyais que c’était un super héros.
J’étais stupéfait quand ils m’ont dit qu’il avait réellement existé ! » Depuis,
la fascination pour le personnage ne l’a plus quitté. « Il est dans la lignée
des Guillaume le Conquérant et Jules César. Mais allez chercher des cheveux de
César ! »

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  • : Bienvenue au pays de Napoleon et de ses contemporains, vous apprendrez surement bien des choses interressantes sur les empereurs Napoléon Ier et Napoléon III et sur la famille Bonaparte, de ce qu'il reste de ces empires Français au XXIème siècle...
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